Vol de retour

Paris, 27 décembre 2020

Je voulais te voir, malgré les circonstances, je voulais te voir. Entre la Covid-19, ta maladie et la distance qui nous sépare si naturellement, je voulais te voir.

Il se peut que ce besoin, si fort, si pressant, soit juste une justification de plus pour retourner aux origines, pour expier mes vieux péchés. Cette culpabilité rongeante et présente jusqu’à aujourd’hui, celle qui est liée au voyage que je n’ai pas voulu entreprendre il y a bien dix ans.

A l’époque, je n’ai pas eu le courage de partir, de me soumettre à la rencontre, à l’adieu définitif, ni de dire face à face à cette personne que j’aimais tellement, que je voulais qu’elle me pardonne de ne pas avoir été à l’hauteur, ni proche de son chevet quand elle a eu besoin de moi. Je n’ai pas pu lui dire non plus que sa souffrance n’était dépourvue de sens, car elle était une source précieuse d’apprentissage sur la vie et sur la mort.

Malgré mon égoïsme et mon obstination, j’avais compris à cette époque et aujourd’hui encore, que rien ne justifie la présence dans le monde d’un être aimé, si celui souffre, si celui a peur, si le corps et/ou l’âme ont lâché prise.

Aujourd’hui, je monte dans cet avion, je veux faire mes adieux pour la troisième fois, mais cette fois, face à toi. Cependant, juste quelques instants avant de recevoir la consigne de couper la data avant le décollage, et pendant que l’avion accélère sur la piste, je reçois la nouvelle qui m’annonce ton départ. Tu as été plus rapide que moi dans ce voyage vers les étoiles.

Le timing à nouveau mal calculé, m’interpelle non seulement sur ma capacité de réaction, mais surtout sur la capacité d’agir que nous avons tous humains, terriens, parfois si simples d’esprit, face aux faits qui s’avèrent inévitables.

C’était tard sur la piste de décollage de l’Aéroport Charles de Gaulle, une après-midi froide et pluvieuse, déjà sombre, qu’il m’a été impossible d’identifier un nuage, lui attribuer ton prénom et ainsi te voir flotter vers ton voyage éternel.

J’ai donc entrepris ce voyage entre l’angoisse et la douleur, entre la solitude physique et l’isolation de mon masque chirurgical. J’ai sangloté dans l’ombre d’une cabine bruyante et impersonnel, comme cela a dû être ton cas dans ce lit d’hôpital pendant plusieurs semaines, jours, et forcement dans les dernières minutes de ton existence. 

J’ai attendu patiemment les dix heures de voyage qui nous séparaient physiquement avec l’illusion de trouver un nuage de l’autre côté de l’Atlantique, assimiler une ou deux aux formes de ton visage, illuminé par les rayons de soleil d’une belle après-midi, mais tout était sombre.

Je n’avais pas la certitude de pouvoir accompagner tes proches, ceux que je ne vois plus depuis de longues, longues années. A nouveau, je rentre le cœur fendu dans ce pays où toutes les deux nous sommes nées, et dans lequel tu t’es toujours investie, dans ce pays dans lequel tu as toujours cru.

C’est difficile de penser à autre chose qu’à notre rencontre d’il y a un an et demie, quand je t’ai vu en bonne santé pour la dernière fois, et savoir que je ne pourrai plus te voir, t’étreindre entre mes bras, ni rire ensemble, grâce au magnifique pouvoir de ce rire contagieux que tu avais.

Je me suis préparé pour ton départ, mais il me semble que pas assez, pas pour recevoir ce choc seule dans une cabine d’avion. Je vais devoir travailler d’avantage. Le départ d’un être cher permet à ce dernier de larguer les amarres, de lâcher son fardeau, mais en même temps, il renforce parfois les amarres des personnes qui restent. Pour cela, j’espère réellement, sincèrement que ton départ m’aide aussi à lâcher mon propre leste, ce poids que je porte depuis des années et qui je le crains s’est adhéré à ma peau, à mon cœur. Un fardeau qui paraît irrémédiablement se faire plus lourd, à cause de cette nouvelle perte.

Je souhaite que tes proches, les plus proches, aient la force de te laisser partir avec le cœur léger et l’âme remplie, sachant que ton court passage a changé la vie de milliers de personnes, tes patients, tes amis, ta famille. Il aura chère cousine ainée plusieurs manières de te remémorer, de te rendre un petit hommage aujourd’hui et toujours, je t’aime d’ici jusqu’aux nuages, littéralement.

Vuelo de regreso

Quería verte, y aunque todo parecía hacerlo imposible, quería verte. Entre la pandemia, tu enfermedad y la distancia que naturalmente ha separado nuestras vidas, quería verte. Tal vez para expiar mis viejas culpas, para tener el valor de hacer lo que no hice hace más de diez años.

Quise tener esta vez el coraje de ver a alguien que quiero a los ojos y decirle cuanto le quiero, decirle que su sufrimiento no fue vano, que por el contrario nos enseña miles de cosas; aunque de ninguna manera eso sea una justificación para que tu tránsito por este mundo debiera prolongarse.   

Hoy me subí a un avión queriendo entre otras cosas decirte este tercer adiós en persona, pero justo cuando me disponía a cortar los datos, mientras el avión aceleraba por la pista del Charles de Gaulle, recibí el mensaje que me anunció tu partida.

No llegar a tiempo una vez más, me interpela sobre mi capacidad de reacción y de paso sobre la que tenemos los humanos, terrenales y básicos de hacer que las cosas sean distintas, de cambiar lo que es inevitable.

En esta tarde de invierno parisino, lluviosa y fría, ni siquiera pude ver una nube para decirle tu nombre, para que las demás te acogieran en tu viaje eterno, en esa búsqueda de luz, de tranquilidad, de libertad. Esperé paciente esas diez horas de vuelo para ver si el otro lado del Atlántico podía encontrar alguna forma en el cielo para asimilarla a tu rostro, como una forma de adiós, del definitivo. Pero no fue posible, porque a ese lado del planeta también las sombras reinaban.

Empecé éste viaje entre entre la angustia y el dolor, entre la soledad física y el aislamiento de mi máscarilla quirúrgica. Llorando en la penumbra de una cabina ruidosa e impersonal, como debió ser tu caso en esa cama de hospital durante varios días, semanas y muy seguramente durante tus últimos minutos de vida.

No creí que la coyuntura me permitiera acompañar a tu familia más cercana, a quienes no veo hace tantos años. Una vez más regreso a este país que nos vio nacer a ambas, con el corazón en pedazos y sintiendo profundamente este nuevo duelo. Regresar a este país que me genera tantos dilemas pero en el que tú siempre confiaste a pesar de todo, a pesar de todos.

Es difícil estar sola en este avión, pensando en un año y medio atrás, cuando te vi sana por última vez y saber que ya no estarás, que no podré abrazarte, que ya no podremos reír juntas, gracias a tu risa contagiosa y sonora.

Me he preparado para tu partida, pero parece que no lo suficiente. La partida de un ser querido libera las amarras de quien parte pero puede reforzar las de quienes se quedan. Yo espero real y muy sinceramente que tu partida desate las mías, y que el peso de mis duelos previos dejen de ser adherencias pegadas a la piel y al corazón.

Deseo que tus seres amados tengan la fuerza de dejarte ir con el corazón ligero y con el alma llena, seguros de la impronta que dejaste en la vida de miles de personas: de tus pacientes, de tus amigos y de tu familia. Habrá siempre alguna manera de recordarte hoy y siempre querida prima mayor, te quiero hasta las nubes, literalmente.

Publié par Mi vida en cuatro tiempos

Escribo para responder a la necesidad creativa de compartir reflexiones, aventuras y algunas historias personales. J'écris pour exprimer plein d'idées ou de réflexions qu’occupent ma tête quotidiennement. Ce Blog contient aussi quelques histoires personnelles.

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