Un hourra à la prévention?

A différence de la définition du mot prévention concernant au temps passé par une personne en prison avant son jugement; j’avais une idée fixe sur sa signification. Celle-ci plutôt en lien avec la prise de précautions pour éviter des situations graves ou d’accidents.

Le mot prévention me fait inévitablement réfléchir à un sujet controversé : celui de la coresponsabilité. En effet, quand une situation grave se présente, quelqu’un se posera sans doute la question d’une possible coresponsabilité de la part de «la victime». En l’occurrence, on la soupçonne de n’avoir assez prévu l’impact de sa décision, action ou inaction.  

Cette mise en doute devient systématique lorsque les victimes appartiennent ou sont identifiées comme membres d’un groupe humain: soumis, objectivé, méprisé. Malgré l’aversion que cela me produit, je ne peux pas m’empêcher de réfléchir à la subtilité qui est toujours utilisée pour avancer des propos hypocrites et prononcer des jugements a priori.  

Par exemple, dans le cadre d’une situation de viol, d’agression, ou de mort par assassinat, une ombre de doute viendra se poser sur la victime. Qu’à fait-elle pour que les faits se déroulent de cette façon? Quelles étaient ses fréquentations? D’où elle vient? Quelle type de famille a t-elle? Quel type de vêtements portait-elle?

Dans d’autres contextes, l’utilisation du mot prévention est problématique, c’est le cas des questions inhérentes à la défense et à la sécurité nationales. Il existe le concept de guerres et des bombardements préventifs[1]. Cela veut dire qu’un Etat peut lancer des attaques sur un tiers, même s’il n’existe pas de certitude sur la planification ou la mise en place d’actions armées par ce tiers, contre un pays, sa population ou ses «intérêts stratégiques».

Sous le discours de la prévention inscrit dans le cadre militaire des actions abominables ont été commis tout au long du XXème siècle, notamment au proche orient. Les actions militaires préventives finissent toujours par la remise en question des droits des autres. Ces attaques cachent sans doute des rapports de domination lesquels sont le noyau dure de toute intervention.

Les rapports de domination ont toujours existé et ont été justifiés au cours de siècles par des arguments commerciaux, raciaux, civilisateurs, religieux, sexuels et doctrinaires. En fin, nos sociétés sont bâties sur de constructions imaginaires, artificielles, qui peuvent si on le souhaite être transformées ou détruites.

Nos autorités nous vendent la prévention comme une idée positive pour protéger l’ensemble d’un groupe humain. Si nous voulons donner un peu de crédit aux campagnes de prévention routière, de lutte contre le tabagisme, contre la consommation d’alcool et de substances plus dures, il faudrait peut-être analyser l’angle sous lequel elles sont présentées.

Je crains qu’à différence de la campagne évoquée dans la photo choisie pour présenter ce récit, laquelle ne laisse pas planer de doutes sous la responsabilité unique du violeur, les autres campagnes suivent plutôt la règle de la coresponsabilité, et sont bien loin d’être l’exception.

Mais tout cela n’a la moindre importance, car la domination se construit à partir de la négation- limitation des droits des oppressés. Dans le meilleur de cas, la domination est garantie lorsque le contrôle est détenu par les mêmes autorités qui sont en charge de protéger notre système de «droits».

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[1][1] Il existe une différence majeure entre préventive et préemptive. Une attaque « préemptive » se réalise lorsqu’il y a de forts indices qu’une autre partie réalisera une attaque imminente. https://www.brookings.edu/opinions/the-preemptive-war-doctrine-has-met-an-early-death-in-iraq/

Crédits de la photo: campagne diffusée sur de nombreux sites internet, dont celui du
Collectif Féministe Contre le Viol : www.cfcv.asso.fr